Il ne l'avait pas vu venir celle-là, hein ? 100 ans le bougre !
On l'imagine encore en 1935, arrivant en Amazonie avec sa barbe, ses déjà grosses lunettes noires, son Leica autour du cou et son froc trop large qui pue la créosote. Un drôle d'oiseau pour les Nambikwara : ficelle dans les fesses, arc et flèches sur le dos, plume de singe dans le nez. La grande classe. Un peu plus tard sur sa pirogue - direction les Mundé - se débattant avec ces saloperies de gros moustiques. L'accident du guide brésilien, Levi Strauss seul avec les indiens, et quelques semaines suffisent pour qu'on le retrouve les fesses à vif à devoir s'essuyer le trou duc' avec les feuilles collantes de bananiers. Les pages cachées de La vie familiale et sociale des Indiens Nambikwara. Tristes tropiques n'en dira pas plus : "Ainsi s'écoulait les jours à rassembler les bribes d'une culture...".
1974, le crâne chauve (ou presque), joues sous le visage, grosses lunettes noires (toujours), noeud pap' blanc, veste verte et or (la grande classe), fourreau à la ceinture. Levi Strauss prononce son discours de réception à l'Académie française. Tout autour de lui : des chauves, des vieux, et des vieux chauves. Les ronflements ténus ont leur place aux crissements de la corde du hamac sur le tronc des hévéas.
Il n'en faut pas plus pour souhaiter un bon anniversaire à l'ami de toutes les restructurations, à l'auteur de Race et Histoire, ce petit livre au rôle si important dans la vie de l'auteur. Ce petit livre si grand, si bien écrit qui lui donna envie des sciences humaines, ces sciences humaines qui lui donnèrent envie d'aller voir plus loin que le fracas familial quotidien. Merci Claude et bon siècle. Hippocrite et Démocrate te lisent, et moi je te suis reconnaissant.
Zarathoustique, le moustique philosophique
2 commentaires:
Cher Monsieur Hypocrite, et cher Monsieur Démocrate.
Le livre vit une drôle d’époque. Alors que l’édition française bruisse sous les feux de la concentration des grands groupes, devenus depuis une vingt-huitaine d’années des conglomérats menant la diffusion à leur train, la création originale, sortie des réseaux d’influences et de vulgarisation, trouve difficilement son chemin.
De rares structures parviennent encore à assurer un certain champ de liberté aux ouvrages de qualité, mais la création est ensuite gouvernée par le dictat d’un lectorat abreuvé d’un incessant matraquage médiatique visant à nous dire, en somme, que le livre est l’affaire de quelques journaux, de quelques courants littéraires, et de quelques espaces autorisés, que l’on résumera alors aux appellations généralistes de littérature française, littérature francophone, littérature étrangère, littérature anglo-saxonne, littérature africaine, etc.
Cette dernière littérature africaine nous intéresse d’ailleurs particulièrement dans la conceptualisation qui lui est actuellement faite. Il nous vient à l’idée de poser la question farfelue « qu’est ce que la littérature africaine ? »
Cherchant (peut-être bien par une soudaine envie d’exotisme) à lire des ouvrages africains, nous nous sommes rendus il y a peu dans les rayons de la bibliothèque publique d’Information à Paris, et nous avons alors trouvé un rayon « littérature d’Afrique noire ». L’Afrique noire, que signifie cette étrange cotation ? Une littérature se résume-t-elle dans sa classification à la couleur de ses auteurs ? De même, un auteur africain est-il nécessairement un noir ? Nous souvenons de cette femme écrivain-auteur[e] camerounaise blanche-puisque-née-de-parents-français, publiée chez un éditeur français. Otez-nous d’un doute : cette auteur[e] appartient à la littérature d’Afrique noire, c’est bien cela ?
A moins, bien sûr (mais nous n’entendons pas faire preuve d’insolence, rassurez-vous !), que le livre soit aujourd’hui victime, en France et dans ses espaces les plus symboliques, antres de la pensée et de la formation des futurs meneurs de la nation, des plus scandaleux amalgames coloniaux ?
Mais peut-être aussi ne sommes-nous que d’obscurs paranoïaques, ce qui serait une bonne explication à ces quelques 300 mots.
Cher Pépé Malingre,
Merci beaucoup à vous d'avoir pris le temps de nous visiter.
Vous soulevez ici un problème très intéressant, et je pense qu'Hippo et Démo ne tarderons pas à se pencher sur le sens de cette effectivement étrnage expression : "afrique noire".
Affaire à suivre donc.
Vous n'êtes pas parano, non non.
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